Loi de finances 2024 : Surveillance renforcée et pouvoirs accrus de l’administration fiscale

La loi de finances 2024 souligne l’importance d’une surveillance renforcée par l’administration fiscale en France. Cette démarche vise à garantir une meilleure équité fiscale et à lutter efficacement contre la fraude.

Priver les contrevenants fiscaux de certains avantages fiscaux selon les nouvelles directives de l’administration fiscale prévues dans la loi de finances 2024

Les personnes ayant commis des manquements graves à leurs obligations fiscales seront désormais privées du droit de percevoir certaines réductions d’impôt et crédits d’impôt en matière d’impôt sur le revenu et IFI. 

Si cette mesure peut sembler être un moyen dissuasif efficace pour encourager la conformité fiscale, elle soulève également plusieurs questions. Tout d’abord, la définition de “manquements graves” doit être clairement établie pour éviter des interprétations subjectives ou excessives. Une telle sanction ne devrait pas être appliquée pour des erreurs mineures ou des oublis involontaires.

De plus, priver certains contribuables d’avantages fiscaux peut avoir des conséquences disproportionnées, notamment pour les petites entreprises ou les ménages à faible revenu qui dépendent de ces réductions pour maintenir leur viabilité financière. Il est essentiel de s’assurer que cette mesure n’entraîne pas de difficultés financières injustes pour ceux qui sont déjà vulnérables.

Le texte prévoit actuellement que cette sanction ne peut être appliquée pour une durée supérieure à 3 ans à compter de l’année qui suit celle de la condamnation. Une privation indéfinie des avantages fiscaux pourrait en effet être considérée comme excessive. 

Un autre point de préoccupation est l’autorité qui aura le pouvoir de prononcer une telle sanction. Il est essentiel que cette décision soit prise par une autorité compétente, transparente et impartiale, ce qui semble être prévu par le texte puisque ce pouvoir serait accordé au juge pénal. L’introduction de garanties procédurales, telles que le droit à un procès équitable et à un mécanisme d’appel, serait indispensable pour éviter les abus potentiels.

Création d’un délit d’incitation à la fraude fiscale

De plus, un délit spécifique d’incitation à la fraude fiscale a été introduit. Ce délit vise à sanctionner ceux qui fournissent des schémas de fraude, même en l’absence de tout contrôle fiscal ou de poursuites contre les fraudeurs.

Dans le cadre de la loi de finances 2024, cela signifie que des individus ou des organisations qui offrent des conseils, des schémas destinés à aider d’autres à éviter ou réduire indûment leur charge fiscale peuvent être poursuivies.

Bien que l’objectif de cette mesure soit de décourager et de pénaliser la promotion active de la fraude fiscale, elle soulève des préoccupations légitimes, en particulier pour les professionnels du droit fiscal. Les avocats-conseils en matière de fiscalité jouent un rôle essentiel en aidant les particuliers et les entreprises à naviguer dans la complexité du système fiscal, en leur fournissant des conseils légitimes pour optimiser leur situation fiscale.

Comment distinguer entre la fourniture de conseils fiscaux légitimes et la promotion active de la fraude fiscale ? Sans une définition claire et précise de ce qui constitue une “incitation à la fraude fiscale”, dès lors que la « fraude fiscale » en question n’a plus besoin d’être caractérisé, il existe un risque réel que des avocats-conseils en matière de fiscalité puissent être injustement sanctionnés pour avoir simplement fait leur travail.

De plus, cette mesure pourrait potentiellement décourager les professionnels du droit de fournir des conseils fiscaux, de peur d’être poursuivis. Cela pourrait à son tour nuire aux contribuables qui cherchent des conseils légitimes pour comprendre et respecter leurs obligations fiscales.

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Choix du lieu du contrôle fiscale par l’administration dans le cadre d’une vérification de comptabilité

Une des nouveautés de la loi de finances 2024 est que le cadre d’exercice des missions des agents du contrôle fiscal a été renforcé. Les services fiscaux peuvent maintenant prendre l’initiative de délocaliser le contrôle sur place. Le lieu de ce contrôle serait déterminé en accord avec le contribuable ou, à défaut, dans les locaux de l’administration. L’intérêt de cette mesure serait de fournir plus de flexibilité aux services fiscaux lors de l’exécution de ses missions. 

Dans certaines situations, il pourrait être plus efficace ou sécuritaire de délocaliser le contrôle, notamment si les locaux du contribuable ne sont pas adaptés ou si le contrôle nécessite des ressources spécifiques que l’administration peut mieux fournir dans ses propres locaux.

Si cette mesure peut sembler offrir davantage de flexibilité à l’administration fiscale, elle soulève également des préoccupations en termes de droits et de convenance pour les contribuables.

L’administration fiscale justifie cette faculté par le fait que “l’obligation d’effectuer le contrôle dans les locaux de l’entreprise n’est pas adaptée lorsque la situation ou la configuration des locaux ne permettent pas au vérificateur de conduire les opérations de contrôle dans de bonnes conditions matérielles, ou lorsqu’elle est susceptible de porter atteinte à la sécurité des agents de l’administration”. Cependant, cela soulève la question de savoir si cette faculté ne devrait pas être strictement limitée à ces situations spécifiques. 

En effet, il serait plus équilibré que les autorités fiscales puissent utiliser cette faculté uniquement lorsqu’elle démontre être dans les situations énumérées, et non pas de manière discrétionnaire.

Aussi, bien que le lieu du contrôle soit censé être déterminé “en accord avec le contribuable”, on peut se demander à quel point le contribuable aura réellement son mot à dire, surtout si l’administration préfère que le contrôle se déroule dans ses propres locaux.

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L’anonymat des inspecteurs

De plus, dans certaines conditions, les agents des finances publiques peuvent être autorisés à exercer leurs missions de manière anonyme, en particulier lorsque la divulgation de leur identité pourrait les mettre en danger.

L’intérêt de cette mesure est d’assurer la sécurité des inspecteurs dans des situations où la divulgation de leur identité pourrait les mettre en danger ou compromettre l’intégrité du contrôle. Cela pourrait être pertinent dans des cas où il y a un risque élevé de fraude ou d’évasion fiscale, ou lorsque l’entité ou l’individu contrôlé a des antécédents de comportement agressif ou d’intimidation.

Toutefois, là encore, il ne semble pas que cette faculté soit conditionné au fait que l’administration démontre être effectivement dans une situation mettant potentiellement en danger la vie de l’inspecteur, son intégrité physique où celle de ses proches.

L’ère du numérique : la fiscalité à l’assaut des réseaux sociaux

La digitalisation de la société a donné lieu à de nouvelles formes de fraude fiscale, exploitant les opportunités offertes par le monde en ligne. Le projet de loi de finances pour 2024 apporte des mesures innovantes pour contrer ces nouvelles menaces.

Détecter la fraude via les plateformes en ligne

Suite à l’autorisation donnée en 2020 aux autorités fiscales et douanière de détecter la fraude fiscale via la collecte et l’exploitation de certaines données des plateformes en ligne, le projet de loi de finances pour 2024 envisage d’élargir ce champ d’application. Les résultats de cette initiative ayant été prometteurs, il est désormais question d’incorporer davantage de données et de couvrir une gamme plus large de manquements.

L’élargissement des pouvoirs de surveillance des plateformes en ligne pose d’importantes questions éthiques et juridiques. Il est ainsi essentiel de veiller à ce que de tels pouvoirs ne conduisent pas à une surveillance excessive des contribuables sur internet.

De plus, il est crucial de s’assurer que ces mesures ne créent pas une atmosphère de méfiance vis-à-vis des plateformes en ligne, ce qui pourrait décourager les utilisateurs et freiner l’innovation numérique.

 Enquêtes sous pseudonyme sur le web

Un autre volet significatif de ce projet de loi de finances pour 2024 est la possibilité pour les agents des finances publiques de mener des enquêtes actives sous pseudonyme. Ces enquêtes peuvent être effectuées sur des sites internet, des réseaux sociaux, et même des applications de messagerie. Cette mesure vise à renforcer les capacités d’investigation des autorités fiscales dans l’environnement numérique.

L’élargissement des pouvoirs de surveillance des administrations fiscale et douanière sur les plateformes en ligne, tel que proposé par le projet de loi de finances pour 2024, est une épée à double tranchant. Si d’un côté il peut renforcer la capacité de l’administration à détecter et combattre la fraude fiscale, il présente également un risque potentiel pour la vie privée des contribuables.

Il est crucial que de tels pouvoirs soient strictement encadrés. L’accessibilité et l’exploitation des données en ligne ne doivent pas se faire au détriment des droits fondamentaux des individus. Dans une société démocratique, la transparence et le respect de la vie privée sont essentiels.

Il serait donc préférable que ce projet de loi de finances pour 2024 soit accompagné de garde-fous solides et explicites pour garantir que ces nouveaux pouvoirs soient utilisés de manière proportionnée, transparente et dans le strict respect des droits de chaque individu. Sans de tels mécanismes de contrôle, il y a un risque réel que cette mesure, bien que bien intentionnée, puisse être perçue comme une intrusion excessive dans la vie privée des citoyens.

Le Plan d’Épargne Avenir Climat : Une Initiative Ambitieuse, Mais Est-Elle Suffisante ?

Le projet de loi de finances pour 2024 introduit une proposition novatrice : le “plan d’épargne avenir climat”. À première vue, cette initiative semble prometteuse, offrant aux épargnants une opportunité d’investir directement dans la transition écologique de la France. Mais que signifie-t-elle concrètement pour les épargnants et pour l’environnement ?

Qu’est-ce que le Plan d’Épargne Avenir Climat ?

En substance, le “plan d’épargne avenir climat” exclusivement réservé aux personnes de moins de 21 ans est conçu pour encourager les investissements dans des projets ou entreprises qui soutiennent la transition écologique et la lutte contre le changement climatique. Ce plan pourrait potentiellement canaliser une partie importante de l’épargne privée des jeunes vers des initiatives durables, contribuant ainsi à la réalisation des objectifs climatiques de la France. La sommes des montants épargnés et des revenus générés permettront aux épargnants de préparer leur entrée dans la vie active.

Des Avantages Fiscaux pour les Épargnants

Pour rendre ce plan attractif, les revenus générés sur ce plan, seront exonérés d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux.

Si l’initiative est louable, il est essentiel de se demander si elle est suffisante. La transition écologique nécessite des investissements massifs, et bien que ce plan puisse canaliser une partie de l’épargne privée vers des projets durables, il est crucial de s’assurer qu’il ne s’agit pas simplement d’un “effet d’annonce”. Les modalités précises du plan, une fois dévoilées, seront essentielles pour évaluer son efficacité réelle.

De plus, il est impératif que les projets financés par ce plan soient rigoureusement évalués pour garantir leur impact environnemental positif. Il ne suffit pas d’investir dans des projets estampillés “verts” ; il faut s’assurer que ces projets ont un impact réel et mesurable sur l’environnement.

Niveau minimum d’imposition pour les grandes entreprises

La fiscalité des entreprises multinationales est un sujet de préoccupation croissante, tant au niveau national qu’international. Le projet de loi de finances pour 2024 répond à ces préoccupations en introduisant de nouvelles mesures pour garantir une imposition équitable.

Transposition de la directive (UE) 2022/2523

La France a décidé de transposer la directive (UE) 2022/2523 du 14 décembre 2022. Cette directive vise à assurer un niveau minimum d’imposition mondial pour les groupes d’entreprises multinationales ainsi que pour les groupes nationaux de grande envergure. Ce taux minimum est fixé à 15%. Cette mesure vise à éviter que ces entreprises ne délocalisent artificiellement leurs bénéfices vers des juridictions à faible imposition.

Voici les points clés de cette nouvelle mesure :

  1. Cible: Cette taxe s’appliquera principalement aux grandes entreprises multinationales avec un chiffre d’affaires de plus de 750 M€ sur deux des quatre dernières années. Les entreprises opérant uniquement en France et atteignant ce seuil sont également concernées.
  1. Objectif: Si les entités d’un groupe multinational paient un taux d’imposition effectif inférieur à 15 % dans un pays donné, l’entité mère du groupe en France devra payer un impôt complémentaire pour compenser cette différence.
  1. Calcul: Le taux d’imposition effectif est déterminé en comparant les impôts payés par les entités du groupe dans un pays à leurs bénéfices. Des ajustements sont faits pour s’assurer que les bénéfices sont comparés sur une base uniforme.
  1. Impôt supplémentaire: La loi de finances 2024 introduit un impôt complémentaire si les entités d’un groupe paient moins que le taux minimum de 15 %, la différence sera facturée comme un impôt complémentaire en France.

Si l’introduction d’un impôt complémentaire peut sembler être une mesure efficace pour garantir que les entreprises paient leur juste part d’impôts, elle présente également des défis potentiels. Tout d’abord, la complexité de la mesure, avec ses nombreux retraitements et critères spécifiques, pourrait représenter un fardeau administratif pour les entreprises, en particulier pour les PME qui pourraient ne pas avoir les ressources nécessaires pour naviguer dans ces nouvelles exigences.

De plus, bien que l’objectif soit de cibler les entreprises qui échappent à l’imposition grâce à des montages fiscaux agressifs, il est essentiel de s’assurer que les entreprises qui opèrent légitimement dans des juridictions à faible imposition ne soient pas injustement pénalisées.

Enfin, il est important que l’administration fiscale fasse preuve de transparence dans l’application de cet impôt complémentaire, en fournissant des directives claires et en assurant un processus d’appel équitable pour les entreprises qui estiment avoir été injustement imposées.

Incitations fiscales pour l’industrie verte

Afin de soutenir la transition vers une économie plus verte et durable, le projet de loi de finances pour 2024introduit des mesures fiscales incitatives pour encourager les entreprises à investir dans des technologies et des processus respectueux de l’environnement.

La loi de finances 2024 et le crédit d’impôt pour les investissements verts

L’une des mesures phares de cette initiative est la création d’un crédit d’impôt destiné aux entreprises qui investissent dans l’industrie verte. Bien que les détails spécifiques de ce crédit d’impôt restent à préciser, l’objectif est de fournir un soutien financier tangible aux entreprises qui s’engagent activement dans des projets éco-responsables.

Ce crédit d’impôt viendra compléter d’autres mesures existantes, renforçant ainsi l’engagement de la France en faveur de la transition écologique. Les entreprises qui bénéficient de ce crédit d’impôt pourront réduire leur charge fiscale, ce qui, espérons-le, les incitera à augmenter leurs investissements dans des solutions vertes.

Si, à première vue, l’initiative semble louable, il est essentiel de se demander si elle sera suffisamment incitative pour réellement orienter les choix d’investissement des entreprises vers des solutions plus respectueuses de l’environnement. Historiquement, certains crédits d’impôt, malgré leur bonne intention, n’ont pas toujours abouti aux résultats escomptés en raison de leur complexité ou de critères d’éligibilité trop restreints.

De plus, il est plus que nécessaire de s’assurer que ce crédit d’impôt ne bénéficie pas uniquement aux grandes entreprises ayant les moyens d’exploiter de telles incitations, mais qu’il soit également accessible aux PME et start-ups qui sont souvent à la pointe de l’innovation verte.

Enfin, l’efficacité de cette mesure dépendra en grande partie de la rigueur avec laquelle elle est mise en œuvre et contrôlée. Il est impératif d’éviter les “effets d’aubaine” où les entreprises pourraient être tentées de requalifier des investissements existants ou non pertinents sous l’appellation “verts” pour bénéficier du crédit d’impôt.

Souhaitez-vous profiter de ces avantages fiscaux ? Prenez rendez-vous avec nous pour discuter de la meilleure façon d’optimiser votre situation fiscale.

Modifications du barème de l’impôt sur le revenu

L’impôt sur le revenu est un pilier majeur de la fiscalité française, et le projet de loi de finances pour 2024apporte des modifications significatives à son barème.

Indexation sur l’inflation pour les revenus de 2023

Afin de garantir que l’impôt sur le revenu reste en phase avec l’évolution économique, le barème sera désormais indexé sur l’inflation pour les revenus de 2023. Cette mesure garantit que les contribuables ne subiront pas d’augmentation d’impôt simplement en raison de l’inflation.

Grilles de taux par défaut du prélèvement à la source

Le prélèvement à la source, introduit récemment en France, a simplifié le processus de paiement de l’impôt pour de nombreux contribuables. Les grilles de taux par défaut seront ajustées pour refléter les changements apportés au barème de l’impôt sur le revenu.

En résumé, la loi de finances 2024 apporte plusieurs changements majeurs dans la gestion et la réglementation fiscale par l’administration fiscale en France.

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À propos

Je m’appelle Didier Opko, je suis avocat fiscaliste. Il y a beaucoup d’informations en ligne sur la fiscalité, mais c’est souvent mal expliqué, trop compliqué et c’est dur de jongler entre toutes les sources d’informations. C’est pour cette raison que j’ai crée Point Fiscal !

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